Mayotte : le transfert des clandestins vers la métropole, une nouvelle recommandation parlementaire

Estelle Youssouffa, parlementaire mahoraise, se bat pour abolir le visa d’exception qui limite le séjour des étrangers sur l’île. Son but est de responsabiliser l’État et de répartir plus équitablement les migrants.

La commission des Affaires étrangères a publié un rapport parlementaire ce mercredi avec une proposition osée. Répartir les migrants afin de désengorger Mayotte. Les rapporteurs, la députée Liot de Mayotte et l’élu Horizons de Corse Laurent Marcangeli, ont dressé un tableau précis de l’impact de l’immigration sur le 101e département français. Selon eux, la métropole devrait assumer sa responsabilité. Estelle Youssouffa : « On nous dit que l’immigration des Comores n’est pas un souci alors que tout le monde en profite ! ».

La campagne Wuambushu, qui a été lancée en avril pour démanteler les bidonvilles, avance à pas de tortue et les parlementaires préconisent de mettre fin au « Visa Territorialisé à Mayotte ». Ce titre de séjour, permet aux étrangers de se rendre à Mayotte sans pouvoir aller plus loin . (à moins d’avoir des attaches familiales en France). Les Mahorais, peu importe leur bord politique, réclament depuis longtemps l’abolition de cette limitation. Estelle Youssouffa déclare : « On nous demande de serrer les dents, on nous accuse aussi de manquer de solidarité. Mais ici, on est saturés. 50.000 étrangers en situation irrégulière, c’est trop pour notre petit territoire de 374 km². Alors que pour l’Hexagone, ce n’est pas grand-chose! »

Instauration de l’AME

Selon les données fournies par l’Agence régionale de santé (ARS) de Mayotte, en 2022, 93.000 patients français coexisteront avec 85.000 patients d’autres origines, ce qui représente la moitié des traitements hospitaliers à Mayotte. Pour pallier à ce problème, des députés suggèrent l’instauration de l’AME, qui n’existe pas à Mayotte pour l’instant. Cette mesure permet aux étrangers en situation irrégulière, répondant à certaines conditions de résidence et de revenu, d’accéder aux soins médicaux en France.

L’étendre à l’île a pour but de soulager le centre hospitalier de Mamoudzou, qui s’occupe de tous les soins. Selon Estelle Youssouffa, la moitié des fonds alloués à l’hôpital sont réservés aux soins offerts aux étrangers. Ce qui crée une situation où les Mahorais, qui doivent payer pour leurs soins, sont mis de côté et doivent attendre après les Comoriens.

Un autre avantage de l’AME serait de révéler le prix réel de l’immigration sur le système hospitalier de Mayotte. Mansour Kamardine, député LR soutenant cette idée depuis longtemps : « Avec l’AME, au moins, le bilan sera net et précis ». Selon lui, « On a proposé cette proposition depuis des années, mais l’État a toujours refusé. Je pense que ce refus est dû à la volonté de cacher le coût réel de l’immigration pour la santé à Mayotte à la métropole ». L’élu a par ailleurs souligné que près de 75% des transferts sanitaires vers La Réunion concernent des étrangers mahorais.

Avec une discussion sur l’immigration à venir cet automne, cette proposition pourrait créer des remous en métropole. Gérard-François Dumont, un expert des DOM et un démographe, est cependant réservé quant à la pertinence de cette mesure. « En France, passer de 200 millions à 1,5 milliard d’Aide médicale d’État en à peine une décennie n’a pas changé grand-chose », dit-il.

Le spécialiste des DOM souligne un danger en particulier l’appel d’air.

Les députés veulent séduire leur électorat et obtenir des résultats rapides. Ils se concentrent sur les stocks plutôt que sur les flux migratoires. Si des étrangers sont autorisés à se rendre à La Réunion et dans les autres territoires français, Mayotte deviendra un grand point de passage pour la métropole et d’autres pays européens.

Des effets à long terme pourraient être sérieux et attirer des personnes d’Afrique orientale et des Malgaches. « Ne nous y trompons pas, les passeurs vont en profiter : plus de clients, plus de prix à payer », souligne Mansour Kamardine. Il ajoute que cette pression est nécessaire pour une prise de conscience collective. Tous ceux qui sont attachés aux droits de l’Homme en France auront une meilleure compréhension de notre problème. Loin des yeux, loin du cœur », affirme-t-il, amer.

La commission des Affaires étrangères a recommandé de maintenir l’aide française envers les Comores tant que ce pays ne sera pas capable de contrôler ses côtes et de prévenir les départs. Un sujet qui n’est pas très abordé, alors que la France est le plus grand bailleur de fonds pour les Comores avec plus de 100 millions d’euros investis juste l’année dernière.

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