Madagascar : Une crise de défiance provoquée par la controverse sur la nationalité française du président Andry Rajoelina

Les adversaires du président estiment qu’il a manqué à ses engagements, et envisagent de recourir à des moyens légaux pour le destituer à l’approche des élections présidentielles, face à cette controverse sur sa nationalité française.

La Tribune de Madagascar s’est posée la question : est-il encore considéré comme chef de l’État malgache selon la loi ? Des témoins rapportent que la naturalisation française de Rajoelina avait été révélée le 15 juin. Le décret signé par le premier ministre Manuel Valls et le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve le 19 novembre 2014. Apparemment, cette nationalité aurait été octroyée à Rajoelina en échange de son retrait temporaire de la scène politique en 2013. Un an après le coup d’État qui l’avait porté à la tête du pays. On pensait que cela aiderait le pays à entamer un nouveau chapitre, en passant outre le régime de la transition.

La participation de Andry Rajoelina à l’élection présidentielle de 2018 n’aurait pas dû être approuvée étant donné que l’article 46 de la Constitution. Celui ci exige que tous les candidats justifient de leur nationalité malgache. Bien que des Malgaches possèdent une double nationalité, le code de la nationalité est très clair là-dessus. « Perd la nationalité malgache, le Malgache majeur qui acquiert volontairement une nationalité étrangère », selon l’article 42. Il s’agit du cas du président qui avait 40 ans lorsqu’il a été naturalisé. Il n’est donc plus considéré comme malgache.

Ses proches tentent de réfuter les informations sur la nationalité française du président

Les proches du président, après avoir été pris au dépourvu, ont fait tout leur possible pour réfuter les informations partagées via des sources anonymes dans des publications. Cette situation pourrait bien s’avérer problématique pour le président d’ici les élections de novembre.

La directrice de cabinet d’Andry Rajoelina a révélé que la nationalité française avait été accordée par filiation. Lalatiana Rakotondrazafy, porte-parole du gouvernement, a précisé que le chef de l’État n’avait pas encore abandonné sa citoyenneté malgache. Il n’avait pas obtenu l’autorisation de l’État, ce qui est exigé d’après le code de la nationalité. Dimanche soir, lors de la réouverture du Rova de Madagascar, Rajoelina a laissé entendre que la situation n’était pas importante. « Personne ne peut effacer le fait que nous sommes malgaches, et personne ne peut changer le sang malgache qui coule dans nos veines ».

Le MMM et son président Hajo Andrianainarivelo ont quitté le gouvernement en 2022 pour protester contre l’impasse politique du pays. Ils ont demandé des explications quant à cette faute morale qui n’a pas été adéquatement justifiée ou crédible, offensant ainsi la souveraineté des Malagasy et leur faisant sentir trahis.

Faute morale

Rivo Rakotovao, chef de l’HVM, a déclaré que la situation était une « trahison » et une « faute morale ». « Il y a un important problème légal, mais ce qui me dérange le plus, c’est qu’il ait menti. Il a juré allégeance à un autre pays en devenant français. Quelle est sa légitimité à défendre Madagascar? » a-t-il dit. Faisant référence à un des enjeux entre Paris et Antananarivo, à savoir la restitution des îles Eparses, il a exprimé son indignation.

Lorsque Madagascar a acquis son indépendance en 1960, la France a récupéré ces îles situées dans le canal du Mozambique, qui faisaient partie auparavant de sa colonie. Andry Rajoelina s’était engagé à résoudre ce litige territorial, mais les négociations sont à l’arrêt. Les caricaturistes malgaches n’ont pas manqué de montrer dans quelle situation Rajoelina se trouve, coincé entre deux drapeaux, l’un très visible, l’autre subtilement dissimulé derrière lui.

L’opposition en discussion

Alors que les partis d’opposition sont toujours en discussion, le HVM envisage la possibilité de désigner une commission d’enquête parlementaire pour une procédure de destitution. Le lundi 19 juin, Fanirisoa Ernaivo, a déclaré qu’une plainte serait déposée devant le tribunal de première instance d’Antananarivo. Cela afin de régler le cas inhabituel de l’extranéité du chef de l’Etat. L’ancienne présidente du Syndicat de la magistrature de Madagascar , a exhorté les gouvernements étrangers et les institutions financières internationales à suspendre tout nouvel engagement jusqu’à ce que le statut de M. Rajoelina soit précisé. Une lettre a été envoyée aux députés français pour les avertir.

Les représentations diplomatiques sont jusqu’à présent restées silencieuses, mais une nouvelle réunion était prévue lundi entre plusieurs d’entre elles. « Pour le moment, nous nous contentons d’observer, mais si cette loi est appliquée, cela reviendra à la Haute Cour constitutionnelle de découvrir que M. Rajoelina n’est plus malgache et de le démettre de ses fonctions », a déclaré l’un d’entre eux.

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