Lundi, Xi Jinping doit se rendre à Moscou pour y retrouver Vladimir Poutine, et Pékin ne lésine pas sur les efforts pour se présenter comme une « puissance responsable ».
C’est une première majeure depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine : lundi 20 mars, Vladimir Poutine, le président russe, accueille à Moscou son homologue chinois, Xi Jinping, pour un séjour de trois jours.
Ce déplacement n’est pas une simple visite de politesse, des discussions sont sur le point de se tenir, donc on est en train de garder un œil sur ça. Pas de temps à perdre, on y va pour négocier ! Peskov, le porte-parole de la présidence russe, a annoncé qu’il y aurait une conversation en tête-à-tête et un déjeuner informel, alors que le [mardi] 21 mars se tiendra une journée de négociations.
Ensuite, le ministère chinois des Affaires étrangères a qualifié le déplacement de « pour l’amitié et la paix ». Est-ce que cela signifie que la Chine va parler de la guerre en Ukraine ? La Chine s’est tenue à l’écart depuis février 2022.
Rien n’indique ce qui se trame ces temps-ci. Pourtant, Pékin a récemment dévoilé sa grande « initiative pour la sécurité globale ». Et cela en plus de s’impliquer avec des affaires comme la reprise historique des négociations entre l’Iran et l’Arabie saoudite.
Avec la Chine qui se présente comme un nouveau médiateur, on se demande bien dans quel intérêt ? Franceinfo a fait le point sur la politique extérieure de la deuxième puissance économique mondiale.
L’Ukraine au coeur des débats sur la « neutralité biaisée »
Le 24 février 2022, lorsque la Russie a envahi la terre ukrainienne, la Chine s’est montrée neutre et a refusé de condamner ou de sanctionner le geste. Elle a préféré jouer la carte de la neutralité.
Le 1er jour de l’invasion, le ministère des Affaires étrangères de Chine a publié un communiqué de 12 points (en anglais) pour rappeler le respect de la souveraineté nationale et pour réclamer l’abandon d’une « mentalité de guerre froide ». Le fameux bras de fer qui a duré près de quarante ans entre les États-Unis et l’Union soviétique.
Le 21 février, Pékin a dévoilé son grand projet de paix, l’initiative pour la sécurité globale, qui ne fait qu’effleurer le conflit ukrainien.
Le document demande en fait de « soutenir la résolution politique des zones de conflit, comme la crise ukrainienne, en recourant au dialogue et à la négociation« . Ainsi, loin des ventes d’armes et du soutien militaire, contrairement aux États-Unis et à l’Union européenne, par exemple.
La Chine se voit déjà en puissance responsable qui apporte de la stabilité dans le monde, selon le sinologue Antoine Bondaz. Et pourtant, il ne croit pas vraiment que Pékin puisse jouer un rôle de médiateur entre Moscou et Kiev. Quand on parle de l’Ukraine, la Chine reste un peu neutre, mais en réalité soutient indirectement la Russie en évitant de la critiquer, selon un expert en politique étrangère chinoise.
Les médiateurs agissent lorsque des agressions ont été commises, comme en l’occurrence l’infraction à la Charte des Nations unies par la Russie… cependant, cette position n’est pas encore soutenue par la Chine.
Zhao Tong, chercheur au Centre Carnegie-Tsinghua de Pékin, a déclaré à RFI que pour Pékin, le conflit en Ukraine est l’opportunité parfaite pour afficher une image de grand pays et pour montrer que la politique étrangère de la Chine est pacifique.
Si l’on se cantonne aux « questions de principe » et qu’on évite les « propositions concrètes », souligne le spécialiste. En fin de compte, la Chine a fourni une réponse en février dernier lorsqu’elle a été accusée de vouloir livrer des armes à la Russie.
Pékin et Moscou continuent leurs exercices militaires ensemble, l’ont annoncé le 15 mars dans le Telegram (russe) du ministère russe de la Défense, concernant des manoeuvres entre la Russie, l’Iran et la Chine, en mer d’Oman.
Comment Pékin tente de gagner le cœur des consommateurs mondiaux
La diplomacy chinoise a fait fort le 10 mars, rétablissant les négociations entre l’Iran et l’Arabie saoudite après 7 ans de brouille.
Une annonce inattendue pour la communauté internationale, mais pas si surprenante selon Antoine Bondaz.
Selon lui, le fait que la Chine essaie de jouer ce rôle n’est pas nouveau, car le premier envoyé spécial chinois pour le Moyen-Orient remonte à 2002.
En 2017, Pékin était la ville qui accueillait les négociations entre Israël et la Palestine. Qui l’eût cru ? Les médias ont été impressionnés par les annonces importantes qui ont résulté de cette médiation, selon le spécialiste.
La Chine met en œuvre des stratégies diplomatiques pour ses intérêts économiques, comme l’indique Antoine Bondaz. « La Chine doit préserver la stabilité pour pouvoir acheter du pétrole iranien, qui fait l’objet de sanctions des pays occidentaux », a-t-il déclaré.
Elle se met à fournir des armes à l’Arabie saoudite, et c’est ce que rapporte le South China Morning Post (en anglais).
Les Saoudiens sont de plus en plus des clients importants pour l’industrie d’armement chinoise. Riyad faisait pas mal parler de lui en novembre dernier, quand il a acheté pour 4 milliards de dollars de matériel militaire chinois, incluant des drones et des missiles anti-navires.
Pas loin de Pékin, le conflit ouvert entre la Birmanie et le Bangladesh, où s’entassent près d’un million de Rohingyas ayant fui la Birmanie, a attiré l’attention de la Chine.
Des discussions sous l’égide des Chinois ont ouvert la voie en octobre 2022 à un retour des populations persécutées en Birmanie, comme l’a mentionné le site spécialisé Modern Diplomacy.
La Chine a un intérêt direct dans cette situation, vu que la crise qui se déroule dans un pays voisin pourrait bien affecter son territoire, comme l’affirme Antoine Bondaz.
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